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Curs
de sable
A Suivre 73 Février 1984,
LOUSTAL - PARINGAUX: COEURS DE SABLE
Chapitre 1 : Baby s'amuse
Fatalement frappés d'un coup de foudre pour Curs de sable, vous
voudrez, bien sûr, en savoir plus sur Loustal et Paringaux. Ils dévoilent un petit peu
d'eux-mêmes et racontent en page 26 l'élaboration d'un récit que notre (leur) seule
modestie nous empêche de qualifier de chef-duvre.
Loustal et Paringaux, vous les connaissez sans doute déjà, à travers
New York Miami et Clichés d'amour,
deux recueils de nouvelles en bande dessinée... qui devaient les
mener, tout naturellement, au '"vrai roman" qu'est Curs de
sable...
Voilà maintenant cinq ans que Jacques de Loustal et Philippe
Paringaux affinent leur méthode de travail en commun. Le premier, architecte attiré par
l'illustration, vit le carnet de croquis à la main, modèle et remodèle ses images. Le
second, journaliste, rédacteur en chef de Rock & Folk a un hobby, inventer des
histoires et mijoter des scénarios. "C'était un peu frustrant, ces récits
courts de nos deux précédents albums. Cette fois, on a vraiment eu envie de travailler
à une histoire complète, à un vrai roman 1".
Un vrai roman qui n'a pas arrêté de grossir.. "A l'origine,
il ne devait pas sortir du cadre classique des 48 pages. Mais notre façon de travailler
s'adapte très mal au mode de récit traditionnel de la BD, avec 6 ou 10 cases par page, -
u l'histoire rebondit de vignette en vignette, jusqu'au dénouement. Ce qui nous
intéresse, c'est de Pouvoir faire des arrêts sur des moments de l'histoire, de Les
développer par l'image, de respecter notre propre rythme. A la première page, le bateau
aurait pu tenir la place d'une vignette en haut à gauche, et c'est tout Mais le récit
que nous avons adopté est plus soucieux de créer des climats. Il faut que, par
lillustration, on sente le temps qui passe, la chaleur, es variations lumineuses,
l'atmosphère."
Les climats de Curs de sable, Loustal est allé les puiser
à la source, en un an et demi de séjour au Maroc. Une imprégnation progressive, qui a
donné peu a peu forme à un projet d'abord vague. "La seule idée de départ,
c'était le Maroc. Le voyage permettait donc de faire des repérages. Pour moi, c'est
primordial d'utiliser une documentation vécue. L'histoire s'est créée, inventée, en
fonction de ce séjour de ce décor. J'ai donc fait beaucoup de croquis, de photos et puis
surtout, j'ai respiré le pays, ses atmosphères. Quand nous avons décidé que l'histoire
se situerait dans les années 30, j'ai écumé les vieilles bibliothèques de
Casablanca."
De son côté, Paringaux entreprenait l'écriture du scénario image
par image. "D'abord avec de simples indications de lieu et d'action. A partir de 4
Jacques pouvait procéder à la visualisation du découpage, à partir des documents qu'il
avait et des images qui l'intéressaient Ce qui donne un crayonné, susceptible
dêtre encore transformé, que j'utilise pour faire Les textes. "Ensuite
seulemen4 une fois l'image retravaillée, c'est la page définitive." Un travail
assez "artisanal", renvoyé de l'un à l'autre, et qui subit en cours de route
toutes sortes de modifications.
Dessin au trait et aquarelle, l'image, dans Curs
de sable, emprunte des moyens nouveaux par rapport au travail passé de Loustal
"Avant j'employais aussi des encres. Mais l'aquarelle est plus riche, elle permet un
gros travail sur la lumière. Chaque image est peinte beaucoup plus que coloriée. En
fait, je passe autant de temps,' à la couleur qu'au dessin."
Pour l'illustrateur qu'est Loustal, le mode de récit "off "
est tout indiqué. "Rien de plus frustrant qu'un gros ballon blanc qui casse
l'image!". Et ce n'est
pas le scénariste qui dira le contraire. "Dans la BD classique, avec bulles,
l'image ne devient bien souvent qu'un fond, seulement suggéré dans la mémoire. Ici, on
savoure d'abord le dessin. Pour nous, il y a un travail intéressant à faire sur le
rapport texte/image et sur tous les décalages possibles. C'est une construction plus
ouverte."
Si la technique du dessin est travaillée, celle de l'écriture n'est
pas en reste. Dans la mémoire de Philippe Paringaux, sommeillent des réminiscences de
littérature américaine mêlée de cinéma. "La technique d'écriture met en
avant les comportements, pas la psychologie des personnages. Je préfère donner au
lecteur des sensations plutôt que des certitudes. Le côté ambigu, pas toujours très
clair, du récit, est voulu. Pour laisse de l'espace au lecteur, ne pas penser pour
lui."
Il faut s'attendre en effet à être traversé par quelques doutes et
mystères à la lecture de Curs de sable. Mais de ces doutes où s'infiltrent
d'autant mieux la force des parfums, celle des instants et leur écho insistant jusqu'au
lieu de l'histoire qui se dérobe, jamais cité, seulement insinué. «Plutôt qu'au
Maroc, elle se situe dans un Orient un peu mythique, un peu l'Orient de Hollywood..."
New York, Miami, l'Afrique du Nord, Loustal et Paringaux
seraient-ils tout à fait allergiques à la gare de Bercy? "Disons que pour
l'attrait du dessin, il faut sentir un décor, être inspiré. Mais rien ne dit que nous
ne ferons pas un jour une histoire en plein Paris, au fond d'une chambre .. n
En attendant, sans doute rêverons-nous mieux par-dessus le bastingage
du « Koutoubia.. »
CLAUDINE LEGARDINIER
A Suivre - N° 74
p. 33 LOUSTAL - PARINGAUX : COEURS
DE SABLE Chapitre 2 : La ville chaude |
A Suivre - N° 75
p. 67 LOUSTAL - PARINGAUX : CŒURS DE SABLE Chapitre 3 : Divine
et la surprise |
A Suivre - N° 76
p. 59 LOUSTAL - PARINGAUX : COEURS DE SABLE Chapitre 4 :
La prison de sable |
A Suivre - N° 77
p.57 LOUSTAL - PARINGAUX : COEURS DE SABLE Chapitre 5 : A
travers le miroir |
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